Qu’est-ce qu'une icône ?


Une icône est une image représentant le sacré, élaborée dans la tradition, les principes spirituels et esthétiques du monde chrétien byzantin. La vénération des icônes est un dogme de la foi, formulé par le septième concile œcuménique.

A l’origine, dans le monde byzantin, l’expression désignait toute expression plastique qui constituait une image sacrée de l’orthodoxie, quelque que soit son support : fresques, peintures sur bois, mosaïques, étoffes, sur supports portatifs ou intégrées à l’architecture religieuse… Actuellement, toutefois, elle ne désigne plus que l’image sacrée formant un objet en elle-même, réalisée sur un panneau mobile, par opposition aux images intégrées à l’architecture.

Il s’agit d’un objet de culte dans la tradition religieuse chrétienne orthodoxe, destiné à une vénération collective, au sein de l’église par exemple, ou bien dans un contexte de dévotion privée. Elle peut être exposée dans l’enceinte de l’église, sur un lutrin ou bien inséré dans l’iconostase, clôture du sanctuaire de l’église orthodoxe, présentoir monumental de nombreuses icônes. Pleinement intégrée à la liturgie orthodoxe, elle peut également être portée en procession lors de cérémonies ou de jours de fêtes particuliers. dans un cadre privé, elle accompagne au quotidien la pratique religieuse du croyant, ainsi que ses voyages et déplacements. Les orthodoxes garnissent le plus souvent un angle ou un coin de leurs maisons de leurs icônes en un petit sanctuaire propre à leur recueillement.



Les origines


Parmi les sources d’influence possibles de l’art des icônes, on peut citer les nombreux et célèbres portraits funéraires retrouvés notamment dans la région du Fayoum (Ier s av/JC-IVe s ap./JC), réalisés à l’encaustique (couleurs délayées dans de la cire chaude) dans un style et des techniques très proches des premières icônes. Les imagines clipeatae, portraits comportant seulement la tête, présentés sur des panneaux de bois en forme de médaillons, ont certainement constitué une autre influence importante. Ces types de portraits étaient très prisés sous l’empire.

Les plus anciennes icônes connues sont conservées au monastère Sainte-Catherine du Mont Sinaï et remontent au VIe siècle. Elles sont réalisées selon la technique de l’encaustique (technique qui sera abandonnée au siècle suivant au profit de la détrempe) et présentent déjà les grandes caractéristiques stylistiques qui feront le succès de cet art pour de longs siècles : yeux grands ouverts, frontalité des personnages, hiératisme, nimbes ; les personnages et thèmes de prédilection sont le Christ, la mère de Dieu et les saints.



Les crises iconoclastes et l’émergence d’une théologie de l’icône


Après un splendide essor, l’art byzantin est secoué par une crise profonde, la querelle des images ou crises iconoclastes entre 730 et 843 ap/JC. Il s’agit d’une période particulièrement violente où de nombreuses personnes ont été persécutées et assassinées pour avoir pris la défense des images sacrées.

D’après la conception de l’Ancien testament, selon un argument largement repris par les iconoclastes ou « briseurs d’icônes », la représentation de Dieu est impossible, puisque toute image ne pourrait être qu’une idole païenne : « Tu ne feras aucune image sculptée, rien qui ressemble à ce qui est dans les cieux là-haut, ou sur la terre ici-bas, ou dans les eaux au-dessous de la terre. Tu ne te prosterneras pas devant ces images ni ne les serviras, car moi Yahveh, ton Dieu, je suis un Dieu jaloux. » (Exode,20,4-5).

La première période de crise, entre 730 et 786, voit interdire les images et de violentes persécutions à l’encontre des partisans de cet art. Les icônes sont détruites, les fresques et mosaïques des églises sont massacrées. Beaucoup de formes décoratives apparaissent en remplacement, entrelacs, paysages, feuillages, simples croix. Cet épisode prend fin avec le Concile de Nicée, réuni par l’impératrice Irène, en 787, qui rétablit les images sacrées. Mais la crise reprend en 813 de façon cependant moins sévère, jusqu’en 843, date à laquelle l’impératrice Théodora met fin à la querelle. Durant les persécutions iconoclastes, les défenseurs de l’image comme saint Germain de Constantinople et saint Jean Damascène cherchèrent à démontrer que l’interdiction n’avait plus lieu d’être.

D’après saint Jean Damascène : « Il fut un temps où Dieu, n’ayant ni corps ni forme, ne pouvait être représenté d’aucune façon. Mais puisque, aujourd’hui, Dieu s’est incarné et a vécu parmi les hommes, je peux représenter ce qui est visible en Dieu. Je ne vénère pas la matière, mais je vénère le créateur de la matière (…). »

Il en découle que le culte ne s’adresse pas à l’image mais à celui qu’elle représente. l’icône n’est pas seulement une image peinte sur une planche en bois, mais le support de communication avec le divin ; elle reçoit les énergies de celui ou celle qu’elle représente et devient ainsi un objet sacré. L’icône du Christ nous permet de contempler, à travers le visage du Verbe de Dieu incarné, le mystère de l’Incarnation.

Après la victoire des saintes images qui met fin à la crise iconoclaste en 843, les icônes se répandent dans le monde chrétien. Les croyants les vénéraient non seulement dans les églises, mais aussi les conservaient à la maison, ou les plaçaient sur les portes des villes. On les voyait aussi brandies comme des étendards, en tête des armées, ou portées en procession dans les rues.



Le miracle des premières icônes


L’apparition des premières icônes fait l’objet de récits liant la naissance de ces images saintes à la volonté et à la vie du Christ lui-même ou bien de certains de ses disciples, tel que l’évangéliste saint Luc. Toutes les icônes seraient donc issues de ces premières images miraculeuses, dites "acheiropoïètes", c’est-à-dire non faites de la main de l’homme.


L’icône de la Sainte Face

Mandylion D’après Evagre, au VIe s, la toute première icône représentant la Sainte Face aurait été réalisée par le Christ lui-même, qui aurait imprimé les traits de son visage sur un drap de lin, devenu le Saint Linge ou "Mandylion" en s’y essuyant, afin de le confier au messager d’Abgar, roi d’Edesse en Syrie, venu rechercher une aide du Christ en vue de la guérison du roi atteint par la lèpre. Il s’agirait de la représentation la plus ancienne et la plus fidèle de Jésus.

Le roi s’en serait trouvé guéri, et par la suite, le mandylion aurait été muré et caché pour le protéger, et on ne le redécouvrit qu’en 544, et nouveau miracle, l’image du linge se serait imprimée sur la brique sur laquelle il était appuyé, ou "Saint Kéramion", c’est-à-dire la sainte brique.

On trouve donc deux sortes de représentations de la Sainte Face : les unes présentant le visage du Christ sur un linge, les autres seulement le visage, en référence au kéramion.


Saint Luc, peintre d’icônes de la Vierge

Saint Luc peignant la Vierge Plusieurs traditions dont la plus ancienne remonte au VIe siècle (Théodorus Lector), présentent saint Luc comme l'auteur d'une série d'icônes de la Mère de Dieu. Cette idée trouve peut-être son origine dans le fait que saint Luc dans ses textes a décrit la Vierge d’une façon beaucoup plus détaillée que les autres évangélistes.

Toutefois les témoignages anciens évoquent de véritables portraits peints. L’un d’entre eux, le modèle du type « hodigitria », aurait été vénéré durant de nombreux siècles au sein de l’église de Sainte-Sophie de Constantinople, constituant l’icône protectrice de la cité. Toutefois la partie originelle peinte par saint Luc, le visage de la vierge, aurait été emportée par Baudouin II lors de sa fuite vers l’occident au XIIIe s, et remployée au sein de la grande icône du sanctuaire de Montevergine près d’Avellino. Le reste de l’oeuvre, représentant le buste de la Vierge et le Christ enfant, de réalisation plus tardive, aurait été impitoyablement détruit au moment du sac de la ville par les Turcs et de la chute de l’empire d’orient, en 1453.


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